Comment la culture influence notre rapport à l’entraînement physique ?

Pourquoi certaines personnes considèrent l’entraînement physique comme une priorité quotidienne, tandis que d’autres le perçoivent comme une contrainte ou un luxe ? La réponse ne se trouve pas uniquement dans la motivation personnelle ou les connaissances en santé, mais aussi — et surtout — dans la culture. Notre rapport au corps, à la performance, au temps libre ou encore à la discipline physique est fortement façonné par notre environnement socioculturel. Dans cet article, nous explorons comment les différentes cultures influencent nos comportements, nos croyances et nos pratiques en matière d’activité physique.

La culture : un cadre invisible mais puissant

La culture regroupe l’ensemble des normes, valeurs, croyances et pratiques partagées par un groupe. Elle façonne nos habitudes quotidiennes, y compris celles liées à la santé, au corps et à l’exercice physique. Cela inclut :

  • La perception du corps idéal
  • La valeur accordée à la performance ou au plaisir
  • Les représentations du vieillissement
  • Les rôles genrés autour du sport

Dès l’enfance, nous intégrons ces normes de manière implicite, ce qui influence durablement notre rapport à l’entraînement.

L’entraînement physique à travers les cultures : des exemples contrastés

Japon : la discipline et l’harmonie corps-esprit
Au Japon, l’activité physique est fortement intégrée dans le quotidien. Des programmes d’exercices collectifs sont diffusés à la radio depuis les années 1920 (les fameux « rajio taiso »). La culture japonaise valorise la discipline, la régularité, et l’harmonie entre le corps et l’esprit (via des pratiques comme le karaté, le tai-chi, ou le yoga). L’exercice est perçu comme un acte d’équilibre personnel et de respect envers soi-même.

États-Unis : la performance et la réussite individuelle
Aux États-Unis, l’entraînement physique est souvent associé à la performance, au dépassement de soi et à l’image corporelle. L’industrie du fitness y est extrêmement développée. Le culte du corps « fit » est très présent, soutenu par les réseaux sociaux, les célébrités et les compétitions. On valorise l’efficacité, les résultats visibles, et la transformation physique.

France : entre santé et esthétique
En France, la pratique sportive est souvent motivée par la santé et l’esthétique. Le sport est vu comme une façon d’entretenir sa forme, de contrôler son poids, mais aussi de compenser les excès. Les politiques publiques mettent l’accent sur le « sport-santé », mais la culture du dépassement ou de la performance est moins généralisée que dans d’autres pays.

Cultures nordiques : le mouvement intégré à la vie quotidienne
Dans des pays comme la Suède ou la Norvège, le sport est intégré dès le plus jeune âge à travers le système scolaire et les activités de plein air. Le concept de friluftsliv (la vie en plein air) valorise le mouvement dans la nature. La culture encourage la prévention et la mobilité douce (vélo, marche, ski de fond), sans forcément chercher la performance.

Le rôle des normes sociales et de l’environnement

Pression sociale et image corporelle
Les normes culturelles définissent ce qui est « un beau corps » ou un « corps en santé ». Dans certaines sociétés, on valorise la minceur, dans d’autres, la robustesse. Ces représentations influencent profondément la motivation à s’entraîner, surtout chez les adolescents et les jeunes adultes.

Étude : Une étude publiée dans Body Image (2019) montre que les adolescents vivant dans des cultures valorisant fortement l’apparence corporelle sont plus enclins à pratiquer une activité physique pour des raisons esthétiques, parfois au détriment du plaisir ou de la santé.

Le rôle de la famille et de l’éducation
Dans certaines cultures, la pratique sportive est valorisée dès l’enfance (modèle nord-américain ou scandinave), alors que dans d’autres, les études ou les responsabilités familiales passent en priorité (ex : certaines régions d’Asie ou d’Afrique). Cela influe directement sur l’habitude et la perception du temps consacré à soi.

Accessibilité et infrastructures
L’environnement joue un rôle clé : accès aux équipements sportifs, sécurité dans les rues, présence d’espaces verts, infrastructures de transport actif… Ces éléments varient selon les pays, mais aussi selon les quartiers au sein d’un même pays.
Fait : L’OMS rapporte que les environnements urbains favorables (pistes cyclables, parcs, éclairage) augmentent jusqu’à 30% la pratique d’activité physique régulière.

Le regard sur soi et sur les autres : le corps comme reflet culturel

Le corps n’est pas qu’un outil fonctionnel : c’est aussi un support identitaire, façonné par le regard des autres. Le sport peut alors devenir :

  • Un outil de valorisation sociale
  • Un moyen de s’intégrer ou de se distinguer
  • Un espace de revendication ou de conformité

Par exemple, dans certaines cultures, un homme musclé est perçu comme fort et confiant. Dans d’autres, l’humilité et la discrétion priment, et la démonstration de force physique peut être mal vue.

Vers une approche plus consciente et interculturelle de l’entraînement

Comprendre que notre rapport à l’entraînement est culturellement construit permet :

  • D’éviter les jugements simplistes : ce n’est pas « un manque de volonté », mais parfois un conditionnement culturel.
  • D’adapter les messages de santé publique ou les conseils d’entraînement selon les codes et les représentations locales.
  • De redéfinir une pratique physique alignée avec ses valeurs personnelles, au-delà des pressions sociales.

Le développement du sport dans le monde gagne à intégrer cette dimension culturelle pour encourager une activité physique durable, adaptée, et inclusive.

Conclusion

Notre rapport à l’entraînement physique n’est jamais neutre : il est profondément influencé par la culture dans laquelle nous grandissons et vivons. Qu’il s’agisse de la vision du corps, de la notion de performance, ou de la manière de bouger au quotidien, chaque culture propose un modèle unique. Comprendre ces influences nous permet de prendre du recul, de mieux nous approprier notre pratique, et de créer une relation plus saine et durable avec le mouvement. Finalement, il ne s’agit pas de s’adapter à une norme universelle, mais de trouver sa propre manière d’être actif, en cohérence avec ses besoins et ses valeurs.