Être coach, c’est aussi être athlète ?

« Est-ce qu’un coach doit pratiquer un sport pour être un bon coach ? »

La question peut sembler simple, presque banale. Pourtant, elle soulève un vrai débat dans le monde de l’entraînement, que ce soit sur un terrain, dans une salle de musculation ou au bord d’une piste. Certains affirment qu’un bon coach n’a pas besoin de transpirer pour transmettre. Que la connaissance, l’expérience des autres et la maîtrise des outils suffisent. D’autres, au contraire, défendent l’idée qu’on ne peut vraiment guider que ce que l’on connaît de l’intérieur. Qu’il faut avoir soi-même ressenti, testé, échoué, persévéré.

Et moi dans tout ça ? En tant que coach sportif et préparateur physique, je suis convaincu d’une chose : pratiquer un sport, quel qu’il soit, est une richesse précieuse, presque indispensable, pour entraîner avec justesse et cohérence.

Attention, je ne parle pas ici de niveau de performance, ni de palmarès. Il ne s’agit pas d’être plus fort que ses athlètes. Il s’agit d’incarner ce qu’on transmet. De comprendre avec le corps ce que la théorie explique avec des mots. De rester connecté à la réalité du terrain, aux contraintes, aux sensations, aux doutes, à l’envie.

Dans cet article, je vous partage ma vision du coaching : pourquoi je crois profondément qu’un coach gagne à être aussi un pratiquant. Et en quoi cela change tout, pour soi, pour l’athlète, et pour la qualité de la relation qu’on construit ensemble.

Comprendre avec le corps : quand la pratique enrichit la théorie

On peut lire tous les livres de biomécanique, suivre les meilleurs séminaires sur la programmation, maîtriser les cycles de charge ou les profils force-vitesse… Mais à un moment, il y a quelque chose que seule l’expérience du terrain permet de ressentir : la vérité du corps en mouvement.

Quand on pratique, on ne se contente plus de connaître intellectuellement ce que vit un athlète. On le ressent physiquement. On sait ce que ça fait de pousser sur une dernière série de squat jambes en feu. On sait ce que c’est que de se lever un matin avec une fatigue que les chiffres de la montre n’expliquent pas. On comprend les baisses de motivation, les frustrations d’un plateau, le doute avant une course ou la peur de se reblesser.

Cette connaissance incarnée ne remplace pas la théorie, elle la complète. Elle affine notre regard. Elle rend nos conseils plus concrets, plus réalistes, plus justes.

Quand je programme une séance, je ne pense pas seulement en termes de zones d’intensité ou de volumes hebdomadaires. Je pense aussi à ce que ça fait, dans le corps et dans la tête, d’enchaîner ce bloc-là avec celui qui vient avant. Parce que je l’ai vécu. Parce que je le vis encore.

Et cette compréhension-là, elle change tout. Elle nous aide à anticiper, à adapter, à accompagner avec plus de pertinence. Pas pour dire « je sais mieux », mais pour dire « je comprends ce que tu vis. »

C’est cette proximité, ce langage commun entre coach et athlète , qui crée de la confiance, de la cohésion, et de la progression.

Légitimité, crédibilité et exemplarité : incarner ce que l’on transmet

Être coach, ce n’est pas simplement donner des consignes. C’est inspirer confiance, motiver, guider — parfois dans des moments d’incertitude, de fatigue, ou de perte de repères. Et dans cette relation humaine, la crédibilité joue un rôle majeur.

Quand un coach pratique, ne serait-ce qu’un minimum, cela change la perception que l’athlète a de lui. Il ne parle pas depuis une tour d’ivoire. Il parle depuis le terrain, les baskets aux pieds, les mains sur la barre, ou les jambes dans le bitume. Il ne donne pas un conseil sorti d’un livre : il partage une expérience, une lecture du corps, un ressenti qu’il a lui-même traversé.

Sans chercher à jouer au super-héros, pratiquer renforce la légitimité du discours. On n’est plus seulement celui qui observe, on devient aussi celui qui vit. Et dans une relation de coaching, ça change tout. Le message passe mieux. Il est mieux entendu, mieux compris. Parce qu’il est incarné.

Cela ne veut pas dire que le coach doit être plus performant que ses athlètes. Au contraire, vouloir entrer en compétition avec eux serait une erreur. Le but, c’est d’être un modèle de rigueur, de cohérence, d’implication. Montrer que soi-même on s’entraîne, qu’on s’applique les principes que l’on enseigne, c’est une forme de respect. Un engagement réciproque.

On attend souvent des athlètes qu’ils soient réguliers, motivés, disciplinés. Mais est-ce qu’on s’impose à nous-mêmes cette exigence ? Est-ce qu’on incarne ce que l’on attend des autres ?

À mes yeux, c’est là que se joue une grande partie de la qualité du coaching. Dans cette capacité à être exemplaire, sans être parfait ; à être crédible, sans être dominateur. Juste à être vrai.

Le piège de l’ego et la confusion des rôles

Pratiquer, oui. Mais pratiquer avec lucidité.

Car si la pratique peut enrichir la posture de coach, elle peut aussi devenir un piège si elle n’est pas bien comprise. Le danger, c’est de tomber dans une forme de projection : vouloir faire faire à l’athlète ce qu’on a soi-même aimé, réussi, ou cru efficace. Ou pire encore, vouloir exister à travers l’athlète, comme si sa performance devenait le prolongement de notre propre ego.

Ce n’est pas parce qu’on a été athlète qu’on est forcément un bon coach. Et ce n’est pas parce qu’on est encore pratiquant qu’on doit calquer son modèle sur les autres. L’expérience ne fait pas la pédagogie. Et la performance personnelle ne garantit ni l’écoute, ni l’adaptabilité.

Coacher, c’est avant tout servir l’autre, pas soi. C’est être capable de comprendre que chaque corps, chaque mental, chaque parcours est différent. Et que ce qui a fonctionné pour soi n’est pas forcément pertinent pour quelqu’un d’autre.

C’est aussi savoir faire passer l’athlète avant son propre besoin d’exister. Quand le coach est plus préoccupé par sa montre GPS que par le regard de son athlète, il y a quelque chose qui cloche. Quand il se compare, se surimpose, ou se rend indispensable, il sort de son rôle.

Pratiquer, oui. Mais pas pour briller. Pour comprendre. Pour ajuster. Pour guider avec humilité.

Et ça, ça demande un vrai travail d’équilibre. Entre implication personnelle et recul professionnel. Entre passion et objectivité. Entre le « je vis » et le « je te regarde vivre ».

Ma vision personnelle : performer pour mieux comprendre, pratiquer pour rester aligné

Si je choisis de continuer à pratiquer aujourd’hui, ce n’est pas un simple loisir. C’est un engagement double : je m’entraîne pour performer à titre personnel, mais aussi pour vivre ce que mes athlètes vivent, et mieux les accompagner.

Je ne vois pas la pratique comme un complément de mon métier, mais comme une extension naturelle de ma posture de coach. En me confrontant moi-même à l’exigence de l’entraînement, aux blocages, à la charge mentale, à la gestion du stress avant une compétition, je reste en prise directe avec la réalité du terrain. Ce que je programme pour mes athlètes, je le ressens aussi. Ce que je leur demande, je me l’impose.

Quand je cherche à progresser, je ne suis pas dans la théorie. Je suis dans le doute, dans les ajustements, dans l’adaptation. Et ce vécu me rend plus précis, plus lucide dans mes choix. Je ne me contente pas d’observer, je traverse moi-même les processus que vivent ceux que j’accompagne. Et cette immersion, pour moi, est une richesse.

Cela ne veut pas dire que j’utilise mon parcours comme modèle universel. Mais cela me permet d’avoir une boussole intérieure, un repère concret. Parce que je sais ce que représente une planification ambitieuse, une coupure involontaire, une compétition ratée, ou une montée en puissance bien gérée. Et quand un athlète me parle de ses sensations, je ne les analyse pas uniquement avec des données je les ressens aussi de l’intérieur.

Je ne me définis pas comme un athlète-coach, mais comme un coach-pratiquant engagé dans la performance. Un coach qui cherche à être cohérent, à rester aligné, et à transmettre ce qu’il incarne. Ma pratique me nourrit. Ma performance me questionne. Et cet équilibre me rend plus juste dans mon métier.

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Pratiquer pour coacher mieux, pas pour prouver

Est-ce qu’un coach doit forcément pratiquer pour être bon ? Pas forcément. Mais dans ma vision du métier, pratiquer, c’est un choix de cohérence.

C’est un moyen de rester connecté au terrain, de comprendre avec le corps, et pas seulement avec la tête. C’est aussi une façon de construire sa légitimité autrement qu’à travers des diplômes ou des résultats passés. Parce que le coaching, ce n’est pas seulement dire quoi faire, c’est savoir guider, écouter, ajuster, inspirer.

En continuant à m’entraîner avec exigence, je nourris à la fois ma propre progression et la qualité de mon accompagnement. Je ne cherche pas à prouver quoi que ce soit, ni à me comparer à ceux que je coache. Je cherche à comprendre plus finement, à anticiper plus justement, à incarner plus sincèrement.

La pratique n’est pas une obligation pour être coach. Mais pour moi, elle est devenue une évidence. Une manière de rester aligné entre ce que je dis, ce que je fais, et ce que je demande.

Et au fond, c’est peut-être ça, le cœur du métier : être un repère, pas un exemple. Mais un repère vivant. En mouvement. En chemin.

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Une étude publiée sur PubMed Central met en lumière l’intérêt de la pratique incarnée pour enrichir la transmission du geste sportif. Pour approfondir les approches méthodologiques, les modèles de coaching FUEL et CIGAR permettent d’établir des conversations de coaching plus humaines et efficaces.